jeudi 24 juillet 2008

Soupe

Regardez vous les nuages ? C’est bien. La prochaine fois, mangez les ! Le ciel est une immensité palpante plus que palpable. Pelisse amniotique. On voudrait en manger, à pleine main, à pleine bouche, à pleine goulée, plus la couleur est intense, épaisse, moins la soupe céleste est chiche, le renard galant ne crèvera pas de faim cette fois. Et la cigogne au long bec peut elle aussi y plonger avec délice son appendice fuselé. Êtes vous furieux de vos petites historiettes qui tournent en boucle dans votre tête. Ribambelle de mots, perdent ils leur sens pour autant ? Pas sûr, pas certain. A creuser. On dit qu’à force de répéter, tout part, tout va à vau l’eau, étrange expression qui elle reste bien ancrée dans son terreau natal, saule ou maïs, ils tiennent la route avec leur bras organiques et musclés. Exemple le plus probant, le fameux « ça va ? ». Se référer à la cause organique pour plus d’informations.

Renvois incessants, quand arrêteront nous de recycler. La création tourne en boucle et une fibre craque, ce n’est pas l’art du Mulet, mais celui des Fondateurs, une branche seulement, un peu tordue, un peu déviée, mais dans le sens positif des choses, comme une échappée sauvage, un élan de liberté, et se cristallise dessus les quelques grains verticaux, jets de monades comme codes de la Matrice. Qui veut un livre ? Référence assurée ? Mais, cela ne vaut rien et c’est là le drame. Notes bibliographiques permanentes, pourquoi donc les expliciter, comprend qui peut et basta. Et le partage alors ? Comment peut on sortir de nous pour aller vers eux ? Réflexion tirée, étirée. Et si et si… Et si on faisait un texte empli de citation… Aucun mot ne nous appartient, même pas leur arrangement… Les mots nous échappent, ceux des morts nous restent, mais alors quand je le prononce ce mot qui roule sous la langue qui claque contre la langue, qui siffle le long des lèvres, n’est il pas à moi ? Et ce mot que je trace, qui s’arrondit sous ma plume, qui s’élance et s’affine en un élan du poignet, qui gratte le grain du papier, qui s’étire sur les lignes, n’est il pas à moi ? Et ce mot qui souffle à mon oreille, qui vibre sur mon tympan, qui illumine mes synapses, qui boule dans mon cerveau, qui se contorsionne dans ma mémoire, qui se noud avec ses presque semblables, n’est il pas à moi ? Et ce mot qui tourne dans mes nerfs, qui se reflète dans mes yeux, qui tord ma bouche, qui affole mes sens, qui contracte mes boyaux, qui chatouille ma peau, qui construit ma pensée n’est il pas à moi ?

Peut on réclamer une totale propriété sur un arrangement qui n’est finalement qu’un dogme, paradigme d’Anciens, de plus ? C’est comme vouloir une âme complètement à soi. Absurdité en la matière. On peut prétendre, mais effectivement nous n’avons rien. Nos irritations contre notre corps en sont une preuve flagrante. La volonté est là pour ne s’accorder avec rien. Vieux reflexe culturel disons.

Alors flottons flottons encore et encore, pour ne pas saisir les instants, pour être ces instants.

Alors tournons tournons toujours pour ne pas oublier que nous sommes la terre.

Alors marchons marchons pour prendre racine, (res)source.

Alors rêvons rêvons, pour exister.

Enfin…

R¨.

Mercredi vingt trois juillet deux mille huit

samedi 19 juillet 2008

Coupe

Bien le bonjour mes mignons ! Tout va pour la tiédeur du soi-disant bien dans le monde, nous pouvons continuer. Ne nous égarons pas sur le sentier de l’Idée sublime d’une droiture sans heurts ni nœuds. J’aime les nœuds dans le bois ce sont comme des petits cœurs, qui racontent, qui subliment des histoires, des passés qui deviennent présents. Présents dans ma main, sous les doigts fébriles de la connaissance, petit soleil noir. Avec des concessions marrons par moment, par instant. Je coupe à la virgule. Net. Mais je continue. Encore et encore. J’ai l’impression de me répéter, je ne roule pas sur ce lent ruban sans fin que toutes les voitures s’attendent attendries à voir s’arrondir sous leur roue unique de prêt-à-vivre.

Passer une frontière n’est pas anodin. C’est cliché, clivé et maintes fois rembobiné. Mais la subjectivité humaine est ainsi, unique. Un nuage passe nonchalamment, son ombre crée une limite lumineuse sur ma peau éponge, poreuse à tout ce qui vient la caresser. Le sevrage démultiplie les sensations, j’attends fébrile le jour de notre embrassade. Les brassées de fleurs tomberont par milliers tels des germes de salades sur les œufs noirs du caviar en pot. Petits smörgås en devenir. Des milliers de poissons en salades en sortent pour se répandre sur notre ventre de paysan rond et gonflé. Ça grouille partout. Tout sur la serviette. Tout sur le bidon. Et ça explose. Entrailles partout. Entrailles des eaux internationales, zone de non droit, zone déjà délimitée comme illimitée. Les poissons s’en foutent, eux. Mais et toi et toi ? Tu viens d’où ? D’où c’est qu’tu sors comme ça ? Mmh ? D’ici ou de là. De France ou de Suède. Peu importe. La réponse vaut pour l’identité. Et pourtant j’ai passé des frontières. Comme ça en dormant. Comme ça en roulant. Comme ça en aimant. Œil de lynx complètement assommé. Ça me rappelle les livres ça. Petits romans d’aventures, concentrés d’héroïsme fantaisiste. Rose. Tout rose. Et pourtant bien teinté de bleu. Bien teinté de rouge. Et de noir. Pour la cape. La ficelle boulotte le fantôme. Et moi je voyage encore. J’ai beau m’être posée je suis toujours dans tes bras dans le ballottement -le cahotement voudrai-je- des trains high-tech des compagnies du grand nord. On voit les différences capitales. On les ressent, ça stresse. Mais la frontière n’existe matériellement plus que par la chose la plus matérielle : l’argent. Même là où c’est comme partout, la bourse c’est l’indicateur, la balance. Ce n’est plus la vie. On vous demande la bourse ou la vie. Tu réponds la bourse. Et tu gardes la vie. Mais c’est la bourse qui te poursuit, c’est pour la bourse qu’on t’a fait chanter, trimer, adorer, crier, créer. Vecteur de vie. Air vivifiant. Une bourrasque se déchaine, les cheveux volent, le cheich virevolte et je peux de nouveau croire au recommencement.

Circonvolution ultime. Je ne prendrai pas la volte comme facilité. Je ne sais faire que des roulades ; alors roulons, voulez-vous. Le long de la pente du grand volcan en ébullition, le long du Nil et de l’Amazone. Je veux vivre à la frontière invisible, indicible du doux et du salé, du contrôlé et de l’immensité. Que ça bouillonne en profondeur, qu’on y vogue gaiement en surface, peu m’en faut, je veux boire de ce nectar païen, de ce breuvage profane, de ce cocktail détonnant, moussant. Emulsion fluvomaritime. Je veux être un bateau, je veux du roulis, des raclement, m’envoler pour être amorti. Si profondément que la toile craquerait, si doucement que je serai masse, toute entière et non, je ne m’écraserai pas, non, je deviendrai toute, unique, lourde et puissante. Et pourtant si fluide pour le peu de connaissance humaine qui nous reste. Piètre constatation. L’huile flotte. Mais l’huile n’est pas agréable. Le sable tombe, mais il vole aussi. L’huile est-elle capable de voler ? On le saurait à force de nous dire ignorant. Fleurs de cactus, je ne suis pas Yvonne.

R¨.

Samedi dix neuf juillet deux mille huit