lundi 16 juin 2008

Retro

On m’a fracassé les rétroviseurs. Je ne vois plus rien en arrière. Je ne sais plus les instants passés, les rires enjoués et les voix enrouées. La fricassée de la grand-mère a cramé sans circonflexe, je devais pas surveiller. Il ne reste plus rien, la fracture a été propre, on m’a rien dit, juste que c’était gonflant. Ou desséchant, au choix. J’aime la soudaineté de ce genre de table rase, enfin, rase, il me reste ma mémoire défaillante et quelques numéros sans autre envergure que le regard fiévreux de Le Meheu qui a perdu le mot de passe. Ô fiabilité humaine ! Les ressorts des mots qui sonnent comme des cloches responsables le glas de nos amours ne finit que par carillonner aux trente six chandelles dans le désespoir du vide de nos yeux humides. Bovins. Capuccino.

Comme cigare de Dutronc. J’ai, oui, décidé de faire des liens avec les images qui ne sont plus reflétées par rien. Tout reflet est imparfait, on le sait, alors ? Alors quoi ? Pourrait dire cet émouvant JB devant une glace sans tain. Ce « a » est étrange. La capitale n’est pas très loin, je ne sais tout de même si je tiendrai la distance. Distance comme comparaison, on finit par emmêler les routes prodiguées comme conseils de guerre. A droite toute ! A gauche, en avant, marche ! Et c’est parti pour un long voyage au Pays du Passé. Pourquoi tant de majuscules pétifiantes ? J’abêtis les regards pernicieux de la morue en rose qui m’a gonflé pour me mettre de force dans son rétroviseur. J’veux pas moi ! Tant pis. Elle l’a fait. Mais moi j’en ai plus, donc elle a sombré comme tous les autres. Je suis trop forte : j’ai recrée en situation réelle le Titanic et le Hollandais volant. La pollution en plus. La chair morte en moins. Ustensile à utiliser avec précaution.

Mais pourquoi ça avance pas ? Maintenant je peux, je suis vidée et en même temps je suis peinte et collante, adhérente à toute renaissance, même en zombie de ma mémoire ? Ah mais voilà, c’est ça : j’veux une mémoire zombie. Hum, glauque l’image quand même, quand bien même je voudrai être ridicule, là c’est pire qu’être sur un skate et de vouloir rattraper un escargot à réaction. J’arrête les frais et je recommence. En me copiant, anhonteusement. Je suis déçue, mes doigts ne volent plus, mes regard se font humides et les mots restent coincés le long de ma gorge caféinée (il ne connaît que l’inverse, quelle stupidité !). Mouroir des sensations, des espérances, des fantômes, les rails tracées défilent filent filent.

Bon, ça suffit là ! Mes agneaux, je reprend du service ! Pour votre plus grand heur ! La grandeur de mon envolée ne peut que vous apporter un peu de baume au cœur avant de devenir couac comme un canard triste sans sa becquée matinale. Mâtinée de menthe fraiche. Alors hauts les cœurs ! On bande son arc, on s’apprête à tirer Ulysse et on ne vise pas plus bas que les genoux. C’est vicieux sinon ! L’existence est derrière vous ! Vise le ligne de fuite, on part en chasse ! Horizon de mes deux on t’aura. Cours, cours cours cours cours cours… Encore encore encore encore ; le fond de la peinture n’est pas atteint. Chiot haletant que vous êtes, on ne peut compter sur vous que pour mordiller la liberté. Laissez la place aux grands ! Lévriers, à l’attaque. Ils n’ont pas besoin de rétroviseur, eux au moins. A moins d’un mois le paysage en est devenu envahi, il va falloir agir, au mieux. On se rattache aux promesses non tenues pour effectuer le grand saut. Mais pour plonger on en a pas besoin, cela nous freinerait. Sans filet ! Le rétroviseur n’est qu’un parachute. Et coupe les liens la vieille ! Plus b’soin de fils moi ! Je saute !

Bon voyage les amoureux !

R¨.

Lundi seize juin deux mille huit

jeudi 12 juin 2008

Danaïde

Déesse de la nuit, celle qui nous couve et nous couvre. Déesse du splendide, du sublime dirait Kant. On est loin je pense de cette vision historique de la maîtrise du monde. On ne peut le contrôler, on en a toujours eu peur. Alors ? Alors, on plante. On essaye de trimer, d’extraire la graisse des chevaux de bois et de filtrer l’eau de la rose. Ce n’est pas facile mais nous sommes des bêtes têtus et l’on veut se battre. Se battre oui. En fait si on travaille autant c’est plutôt pour faire une chair à canon plus coriace au bout des temps. Quand on se fera croquer par le grand sablier. Et bouffe, savoure et avale le petit grain de sable. On finira en digestion perpétuelle, car une fois tombés, plus de solution, plus d’échappatoire possible, on est en bas et on s’amoncelle. Tas de mort. Tas surpris. Le sablier ne nous reprendra pas pour agrandir sa vaste tête. Pas besoin, tous les jours d’autres arrivent, par milliers, millions. Et que roule le tonnerre et que claquent les éclairs et que grossissent les nuages… Nous sommes dérisoires. Comment avoir la vraie volonté de sauver des structures auxquelles nous ne sommes attachés que par un lien factice, celui du flouze, ou même par un lien de novice, celui de l’habitude ? Mais c’est à nous ! Propriété de mes deux. A nous ? Pas pour la responsabilité. Pas à nous de l faire. Pas d’ma faute. Pathétique et puéril, le jeu de tennis de table a commencé. A toi ! A toi ! Amoi ! A toi ! A lui ! Le soupir de frustration et de résignation. Celui qui fait gronder les entrailles et qui tourne les sangs dans le mauvais sens. Celui de la pulsation meurtrière, de la pulsion impromptue. Mais rien n’est la faute de personne de toute manière. Tant mieux. Tant pis. On a beau dire, j’ai de plus en plus l’impression que nous sommes des êtres de néants. Êtres emplis de vide, que nous devons emplir, imploser ou mourir. Petit trou noir à lui tout seul, l’homme est un genre nébuleux de la galaxie de la Bulle. Sinon, on ne pourrait pas créer. Il faut de l’espace pour créer. Il faut du plein aussi. Pour le dissocier. Et si la création, la pensée même, n’était qu’une injection plus ou moins habile de vide dans un tas de plein. Pour tout dissocier et ré-agencer. Alors ce n’est plus de la création mais de l’organisation.

Je suis une Danaïde. Révélation soudaine, intime et coriace née un jour de pluie ravageuse. Le ciel nous adressait ses plus salivaires horages et nos frêles silhouettes excitées révélaient la puissance que l’on ne pouvait pas déployer. Impuissant et pourtant, nos cerveaux, nos petits synapses étaient en surchauffe, le corps en pilote automatique, enfin pouvoir se lâcher. Réfléchir dans la bouffée d’adrénaline. Expression pure du sublime. Vraiment. Sans blaguer. Là-haut tout grondait, en bas tout se noyait. Pas en masse, mais en esprit. Chaque goutte était vicieuse, son amas était pervers, son mouvement magnifique. Jaillissement spontané de puissance. Direction commune. Pourrait-on faire ça avec des hommes ? Nan, trop de facultés de différences sont en jeu. Et alors, un sortira de la masse. Et là, on a déjà donné. Donc, la déesse Pluie nous envoyait ses charmes ravageurs. Elle se développait là où l’on ne l’attendait pas. J’attendais un scintillement, un amas lumineux pour cligner des yeux et la voir, elle, la belle et enamourachée femelle. Celle qui commande à tout. L’amante du vent qui la caresse. Peut-être que là ses baisers, ses brises et ses rafales avaient su l’exciter assez pour nous faire partager son plaisir. Il ne faut pas croire que c’est delà colère. Non c’est un partage. Mais nous sommes trop petits pour le comprendre. On ne peut la saisir dans toute sa candeur. L’anthropomorphie ne tue pas. Dites si j’abuse. On a besoin des images, nous sommes incapables de fonctionner autrement, quoique puissent en dire les bornés. Eux mêmes le font, de manière déguisée, en réduisant le champ universel de l’image.

Je parle peut-être trop d’éternité.

R¨.

Jeudi cinq juin deux mille huit

vendredi 6 juin 2008

Peau

Padam padam padam padam padam padam padaaaaam padam pam padadadadam
Toujours là mes petits choux? Z’avez décroché de la dimension ultra sensorielle de nos petites vies sans autre rapport au monde qu’un sensualisme aigu?
Tant mieux ! J’aime me répéter. Les lions de la cage aux fauves ne sont vraiment pas contents, on ne leur donne que maigre pitance, ils réclament de la puissance. Mais comment ingérer l’immensité? Comment ordonner nos petits papiers avant qu’ils ne brûlent? ça fait penser à une vieille chansonnette, une de ces ritournelles sans fin dont le sens est perdu dans les méandres, que dis je dans les miasmes mielleux d’une culture trop riche pour être honnête. Comment le connaître? Comment accéder à cette connaissance absolue de soi? Impossible mon capt’aine, c’est évident. Evident, évident. L’acide m’a dit un jour que l’évidence était subjective et donc s’annulait d’elle même. Il n’avait pas tort mais en même temps, l’acide est incapable d’aller au bout de ses pensées, de ses analyses. La dimension suprême de cette observation de côte flottante est une île individuelle et solliptique qui interdit toute connaissance globale, dans sa mer de crème anglaise, glauque, anglauque-saxonne, pour faire un mauvais jeu de mot.

Mais passons à autre chose.

Être écorché c’est perdre toute séparation avec le monde. Être le monde. Alors l’homme qui n’est pas écorché est un être hors du monde.
Un petit avorton qui n’est pas du liquide amniotique mais qui plongé dedans se croit supérieur.
Finir de plonger et se rendre soudainement compte qu’on est là, rien. Rien. Quel mot sordide ! Il incite au tout, à l’immensité impossible à digérer alors on essaye de rendre le néant, de la vomir, par un pur acte de rébellion, par esprit de contradiction. Les doigts volent, on les dirait faits pour ce type de manœuvre. Mais non, on ne peut dire ça sans présupposer tout un tas de choses, tout un tas. Tas de brique ou de terre, tas d’organe ou de peau. Imaginez cette chair dégoulinante de graisse chaude et réconfortante d’un corps qui se voulait confortable à défaut d’être supportable. Non. Mes agneaux, vous en faites trop. Beaucoup trop. L’huître s’est ouverte sous le souffle divin d’un bourreau des cœurs bien humide. Je ne sais plus ce que je disais. C’est agréable non ? Ne pas savoir où l’on va. Ne pas le soupçonner, simplement se laisser aller. Avant c’était le fil de la plume maintenant ce n’est même plus de l’écorchure de papier, non, ici le fleuve même est virtuel. Tout l’est. Mais c’est ridicule ! Réveillez vous ! Pas virtuel pour un sou, c’est le secret le moins bien caché de l’univers. C’est PAS virtuel. La preuve c’est matériel. Et sans le matériel point de sensation d’être dans un autre monde. On s’oublie vite. On s’oublie, vide. Coquille de fin de mois. Crapaud des héros. Sa crapaude n’est qu’un objet gênant. Tout comme ce corps qu’on oublie. On ne sait plus rien. On ne l’a jamais su. Mais jamais non plus nous n’avions eu une sensation de puissance aussi extrême. Le verbe savoir s’écoule dans mes veines comme du sable dans les mains aux doigts écartés du pêcheur rentrant au pays. Pays de qui, de quoi ? A toi de l’inventer. Rien ne nous satisfaisait. On s’était fait un peu trop nul au départ. L’occasion nous est donnée de ne pas refaire le mauvais pas. Mais pourquoi ne pas se rétablir dans la première histoire ? On a le droit pourtant. Oui mais là l’intersubjectivité joue. Et contre nous. Dommage Balthazar. Y’a toujours un lézard qui sent le patchouli dans les histoires d’amour. Où est le mien ? Je veux l’iguane pour chapeau. Pour garant de ma pureté retrouvée. Avance encore un peu. On y est presque.
Je te fais mes condoléances, riverain. La crue s’est déchainée. Les chaînes ont claqué. La déesse Pluie est sortie de son lit. Honore son peignoir ou tu étoufferas sous les décombres de ses dessous de satin-boue. Ses seins boudent notre regard et l’on ne peut que rendre justice et Beauté à son chatoiement vertical si impressionnant.
Impuissance de l’homme.
Surpuissance de l’eau.
Surimpression sensible dans mon champ de vision.

Branchée sur lui. Je m’envole.

R¨.

Samedi premier juin deux mille huit. Jour d’essai.

Oeil

Bonjour mes agneaux, je vous salue bien, petites choses bien paumées. Bryan Ferry vous aidera peut être dans votre long trépas. La vie n’est que ça. Alors allons y gaiement ! Chantons ! Dansons ! Grimpons ! Le rideau… N’est pas pour tout de suite !

Petits à califourchon sur leurs amis. Petits à la calembredaine. Le regard de la châtelaine empli de tendresse alors qu’il finira par s’éclore. Une petite pelote de laine douce et moelleuse. Comme ce chocolat que j’ai mangé hier matin. Tout barbouillé. La tête. Tout embrumé. L’esprit. Mais où est mon corps ? Comment l’exprimer ? Comment l’utiliser ? Comment le faire exister ? Comment le sentir ? Je flotte dans une cuve sans fin, un calisson dans les neurones. Eprouver. Tout ce Réel qui semble sans queue ni tête. Tout ce Virtuel qu’on nous sert à la louche. J’aurai pu t’offrir des frimousses tachetées. Je me suis contentée de petites têtes tranchées. Proprement. Pas de sang, pas de fluide vital versé. Mon corps a besoin de lui. Ne lui retranchez rien. Sauf la tête. Peut-être qu’il agit mieux s’il agit seul. La torture vient de l’esprit. Elle se fait sentir dans le corps. Alors pourquoi le rejeter aussi violemment. Souffrance extérieure pour bourreau intérieur. C’est banal et sans envergure ; mais ça prend sens. Ça se sent dans les veines, ça parcourt les nerfs, impulsion du silence. Vibration au delà du soutenable, trouver ses limites, sans jamais les atteindre. Sommes nous infinis ? La table rase avait tort, on doit tout prendre là comme ça, sur l’instant. Le reste n’existe pas encore. Mais comment faire des projets alors ? Comment soutenir un avenir ? En profitant ? Errance temporelle. Encore une unité arbitraire. Tout l’est de toute manière. Y’a t ‘il une prédestination ? Peut-être choisit on son voyage dans une immense bibliothèque. Trompés sur la marchandise ? La vie n’est pas une marchandise, sinon, contre quoi l’aurait on troqué, au fondement, à la base ?

Je ne fais même pas de liens. Je ne tisse rien. Je suis. Et encore. Il me suffit de libérer mes doigts et aucune histoire ne vient. Peut-être n’est ce pas plus mal. Les miettes sont encore trop grosses pour moi, je ne m’attache qu’aux plumes. A ce filament léger qui se laisse porter. Je ne sais pas quelle chance j’ai. Je ne le sais pas encore. Mais il paraît que je l’ai su. Un jour. Lointain, alors que cette notion temporelle embarrassante n’était pas encore arrivée me structurer ma naïveté. J’ai envie de me les extraire, de vivre hors pour mieux rentrer dans. Observer. Pâle imitation d’une immanence voulue et jamais atteinte. Ma spontanéité est de ne pas l’être. C’est finalement assez drôle. Une trompette sonne la clôture. Et je peux continuer. J’aime l’ordinateur, il exprime cette distance qui s’exerce en moi en permanence. Je vis ma vie à travers l’écran de mes yeux. Yogi du passé. Ordinateur du présent. Serai je leur futur ? La modestie est paraît elle étouffante. Parfois elle paraît naturelle. Nous sommes seuls a dit le grand porteur de pierre. Mais être seul avec soi même n’est ce pas déjà être à deux ? Solipsisme vain et tiré de rien d’autre que l’extérieur de ma pensée. La proposition s’annule d’elle même. Montrerai je tout ça ? C’est bête. Rabaisser pour mieux sauter. Reculer pour mieux briller, éclater. Tout vole en morceaux ! Big band en arrière plan, je prends le train. Les rails ne sont pas de moi. Je ne suis qu’une particule de faire. Une to do de plus sur les listes infernatiques que l’on essaie de mettre en jeu. Joue une carte plutôt !

La virtualité m’adresse encore quelques petits bâtons de plus.

Je l’éprouve.

R¨.

Samedi vingt-neuf mars deux mille huit